Indemnisation d’une victime de brulures graves

Les brûlures, qu’elles soient thermiques, électriques ou chimiques, représentent un traumatisme d’une grande gravité, pouvant entraîner des séquelles physiques et psychologiques avec des répercussions majeures sur la victime et son entourage.

Les traumatismes causés par les brûlures peuvent être intentionnels (violence, agression, suicide, etc.) ou accidentels (accidents de la circulation, accident du travail, accident de la vie
courante).

La société française d’étude et de classification des brûlures indique qu’une brûlure est grave lorsque la surface brûlée:

-Est supérieure à 10% de la surface corporelle totale

-Est inférieure à 10% surface corporelle totale  mais associée à un ou plusieurs paramètres de gravité suivants:

  • Age inférieur à 3 ans ou supérieur à 60 ans
  • Pathologie grave associée, notamment insuffisance cardiaque, diabète et hypertension artérielle
  • Existence de lésions du troisième degré
  • Brûlures localisées au visage, au cou, aux mains ou au périnée : en raison des risques spécifiques esthétiques (visage, cou et mains), fonctionnels (mains) ou infectieux (proximité des orifices naturels)
  • Brûlures survenues lors d’explosion, d’incendie en milieu clos ou d’accident de la voie publique car il existe le plus souvent des lésions respiratoires associées (inhalation de fumées toxiques, traumatisme thoracique type blast ou autre
  • Brûlures électriques ou chimiques

Expertise médicale de la victime d’une brûlure grave

Evaluation de la gravité des lésions initiales

L évaluation de la  gravité d’une brûlure nécessite un bilan lésionnel et surtout l’évaluation du retentissement éventuel sur les fonctions vitales(circulation, respiration, état de conscience).

Le bilan initial d’une brûlure tient compte :

– de la profondeur (4 niveaux, tableau 1)
– de la surface (règle des 9 % ou paume de la main du brûlé ) : si elle est supérieure à 10 %, alors il s’agit d’une brûlure grave
– du terrain (âge avec une mortalité plus élevée chez les moins de 5 ans et plus de 65 ans ; comorbidités associées)
– de la localisation : mains (pronostic fonctionnel), périnée (risque septique), brûlures circulaires (risque de compression des axes vasculaires), brûlures du visage (risque esthétique, fonctionnel
et surtout risque d’atteinte des voies aériennes supérieures et de l’arbre trachéobronchique)
– des circonstances de survenue : temps de contact avec l’agent,explosion associée , lieu confiné (intoxication au monoxyde de carbone, inhalation de fumées contenant du cyanure d’hydrogène, brûlures des voies aériennes), polytraumatisme associé
– du type de brûlure : thermique, chimique (risque local et systémique),électrique (lésions locales limitées aux points d’entrée et de sortie, mais risque de lésions tissulaires profondes du fait du passage du courant).

La date de consolidation

La date de consolidation doit  s’apprécier au terme de l’évolution cicatricielle .
Le médecin expert tient compte en pratique de la fin de la période active des soins et de l’adaptation de la victimes aux  séquelles et  à son environnement.
Souvent, les séquelles fonctionnelles réparables retardent la date de consolidation mais aussi les cicatrices pathologiques.

Une victime brûlée grave peut très rarement être consolidé avant 3 ans.

Chez l’enfant gravement brûlé, la consolidation ne peut pas être fixée avant la fin de la croissance.

Le déficit fonctionnel temporaire (DFT)

Le déficit fonctionnel temporaire total et partiel correspond aux durées d’hospitalisation (réanimation, brûlologie, rééducation-réadaptation) ou de convalescence période où la victime est totalement privée de ses activités personnelles.Dans le cas des victimes gravement brûlées, cette période peut être très longue, de l’ordre de plusieurs années.

Le déficit fonctionnel permanent (DFP) doit être déterminé en considérant, outre le déficit fonctionnel et la surface cutanée brûlée, les séquelles psychiques pouvant nécessiter une évaluation propre par le biais d’une expertise psychiatrique (syndrome dépressif, état de stress post-traumatique).

L’examen des séquelles de brûlures graves en fonction de leur localisation permet d’évaluer l’importance du déficit fonctionnel permanent du fait des séquelles cutanées (rétractions, déformations, alopécies) et des séquelles ostéoarticulaires (limitation d’amplitude, ankylose, déformation, amputation).

Il s’agit donc d’apprécier le retentissement des cicatrices de brûlure sur la fonction essentielle d’une région anatomique, l’évaluation concernant principalement les fonctions des articulations.

Le taux d’AIPP est donc extrêmement variable ;le barème indicatif d’évaluation des taux d’incapacité en droit commun  propose un taux d’Atteinte à l’Intégrité Physique et Psychique (AIPP), variant de 5 à 50% selon le pourcentage de la surface des lésions, spécifique pour les brûlures cutanées étendues et profondes, avec greffe ou cicatrisation.

Le préjudice esthétique (PE)

Le préjudice esthétique temporaire avant la consolidation:

La victime de brûlures graves présente une altération de l’apparence physique du fait des lésions initiales, du processus de cicatrisation et des soins en cours (greffes, expandeurs cutanés, vêtements et masques compressifs, orthèses).

À la consolidation, le préjudice esthétique permanent est évalué par le médecin expert,lequel  va apprécier les séquelles cutanées d’un point de vue esthétique.

Le médecin expert prend en compte les amputations,les cicatrices dyschromiques, hypertrophiques et chéloïdes,l’aspect des greffes (en maillage pour les greffes en filet, en zones de prélèvement en cas d’autogreffe).

Les séquelles peuvent justifier un préjudice esthétique important (6/7) ou très important (7/7)

Les souffrances endurées (pretium doloris)

Le médecin expert va évaluer ce poste des souffrances endurées en tenant compte des soins (réanimation, trachéotomie, pansements sous anesthésie générale, actes chirurgicaux, incisions de décharge, excisions-greffes…), la durée de la rééducation, les cures thermales, le port de vêtements compressifs (pressothérapie) et d’orthèses de maintien, les actes de chirurgie plastique à visée fonctionnelle et esthétique (expansion cutanée, reprise de cicatrices, plasties, traitement de brides ..).

Chez les grands brûlés, les souffrances endurées physiques et morales sont souvent évaluées entre 6 et  7/7.