Cécité suite à une intervention chirurgicale

Le 4 février 2009,une patiente subit une opération chirurgicale au sein du service de neurochirurgie de l’Assistance publique – hôpitaux de Marseille en raison d’un hémangiome du sommet de l’orbite droite

La patiente présente dans les suites immédiates de l’opération une cécité complète de l’oeil droit, un ptosis, une immobilité oculaire ainsi qu’une paralysie complète du muscle des nerfs occulo moteurs.

Rejet de la demande d’indemnisation par la CRCI PACA

Le 15 septembre 2009 la patiente saisit d’une demande d’indemnisation la commission régionale de conciliation et d’indemnisation (CRCI) Provence-Alpes-Côte-d’Azur

 Une expertise médicale est diligentée par la CRCI.

Le rapport de l’expertise réalisée à la demande du président de la commission régionale de conciliation et d’indemnisation (CRCI) conclut que:

-L’indication opératoire était médicalement justifiée et que l’intervention a été réalisée dans des conditions répondant aux règles de l’art

-La perte fonctionnelle de l’oeil droit constitue un accident médical qui est directement imputable à l’acte de soins du 4 février 2009

La CRCI rejette la demande d’indemnisation de la patiente estimant qu’aucune faute ne pouvait être imputée à l’Assistance publique – hôpitaux de Marseille et que le critère de l’anormalité des conséquences de l’intervention faisait défaut pour permettre une indemnisation par l’ONIAM.

Rejet de la demande d’expertise et de la demande d’indemnisation par le tribunal administratif de Marseille

La patiente demande au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, de désigner un expert ayant pour mission de se prononcer sur les conditions de sa prise en charge par l’hôpital de la Timone et sur l’étendue des préjudices qu’elle a subis et, à titre subsidiaire, de condamner, solidairement, ou l’un à défaut de l’autre, l’Assistance publique – hôpitaux de Marseille et l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales à réparer les conséquences dommageables de l’intervention chirurgicale du 4 février 2009.

Annulation du jugement par la Cour administrative d’appel et désignation d’un expert médical

La patiente  relève appel du jugement du 26 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Se fondant sur le rapport d’expertise CRCI, la Cour administrative d’appel considère que:

– L’indication opératoire était médicalement justifiée et que l’intervention a été réalisée dans des conditions répondant aux règles de l’art

-La perte fonctionnelle de l’oeil droit constitue un accident médical qui est directement imputable à l’acte de soins du 4 février 2009

-La requérante a subi une période d’incapacité temporaire de travail de plus de six mois sur une période consécutive de douze mois en lien avec les complications de l’intervention, satisfaisant ainsi au caractère de gravité mentionné à l’article L. 1142-1

S’agissant du défaut d’informations sur les risques de l’intervention,la Cour considère que l’APHM n’appote pas la preuve de la délivrance d’une information et retiennent, en se fondant sur le rapport d’expertise médicale CRCI,une perte de chance de se soustraire aux risques qui se sont réalisés, dont le taux doit être fixé, dans les circonstances de l’espèce et compte tenu notamment des risques respectifs attachés à la réalisation ou non de l’intervention, à 50 %.

Sur la condition d’anormalité du dommage, la Cour précise que:

-La condition d’anormalité du dommage prévue par les dispositions du II de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique doit toujours être regardée comme remplie lorsque l’acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l’absence de traitement.

-C’est seulement lorsque les conséquences de l’acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l’absence de traitement, que les critères de la probabilité du risque et de l’exposition particulière du patient, du fait de sa pathologie ou de sa physiologie doivent être pris en compte pour déterminer si ces conséquences peuvent néanmoins être regardées comme anormales du fait d’une faible probabilité de survenance du dommage dans les conditions où l’acte a été accompli .

La Cour annule le jugement du tribunal administratif et décide que  les préjudices résultant des séquelles fonctionnelles et esthétiques liées à l’intervention auxquelles la patiente a perdu une chance de pouvoir se soustraire doivent être réparés pour moitié par l’Assistance publique – hôpitaux de Marseille et pour l’autre moitié par l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales .

La cour ordonne une expertise médicale aux fins d’évaluation des préjudices temporaires et permanents.

CAA de MARSEILLE, 2ème chambre – formation à 3, 17/03/2016, 14MA03363