Encéphalopathie post anoxique suite à une fausse route

Le 29 janvier 2003,un patient subit une intervention chirurgicale de remplacement prothétique de la crosse de l’aorte.

Les suites opératoires sont marquées par des complications nécessitant des réintubations et une extubation le 7 février 2003 .

Le 9 février 2003, au cours de son petit déjeuner pris au sein de l’établissement de santé, il a fait une fausse route, alors qu’il consommait un croissant et a présenté un arrêt cardio-vasculaire par asphyxie aigüe, à l’origine d’une encéphalopathie post-anoxique et d’importantes séquelles neurologiques

Le patient et ses proches assignent en responsabilité et indemnisation l’établissement de santé et son assureur, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l’ONIAM), ainsi que les médecins-anesthésistes exerçant leur activité à titre libéral au sein de l’établissement de santé.

Absence de protocole explicite sur la réalimentation

Il ressort des rapports d’expertise judiciaire du 11 septembre 2009 et du 10 septembre 2012 que:

-le patient n’avait pas de déficit dû à des lésions du système nerveux et avait une activité importante avant l’intervention chirurgicale

-cette intervention était justifiée et la chirurgie de même que la prise en charge de la première semaine ont fait l’objet de soins attentifs, diligents et conformes aux données de la science médicale

-la réanimation de l’arrêt cardio-circulatoire suite à la fausse route a été immédiate et conforme aux données de la science médicale

-l’arrêt cardio-circulatoire a entraîné des séquelles neurologiques qui handicapent sérieusement le patient dans sa vie quotidienne en dépit des séances de rééducation dont il fait l’objet : handicap locomoteur et d’expression, troubles visuels, crises d’épilepsie et que ces séquelles neurologiques sont en lien direct avec l’accident de fausse route

-la fausse route est en lien avec un défaut d’organisation des conditions de réalimentation et que la responsabilité de l’organisation des soins avec l’absence de protocole explicite sur la réalimentation et l’absence de standardisation de la prescription de la réalimentation incombe aux médecins anesthésistes qui sont effectivement responsables de l’organisation de la réanimation ; qu’en réponse aux dires qui leur étaient adressés, les  médecins experts ont précisé que durant les réunions d’expertise, les médecins réanimateurs ont concédé que le protocole de réalimentation n’existait certainement pas et que la prescription médicale pouvait très bien ne pas avoir été explicite sur le problème de la réalimentation, mais que depuis cet accident un protocole existait.

En appel, les juges du fond estiment que l’arrêt cardiaque a été provoqué par une fausse route et retiennent la responsabilité des médecins anesthésistes et les condamnent à indemniser solidairement les victimes.

La cour d’appel rejette l’action en garantie formée par les médecins anesthésistes contre l’établissement de santé au tire de fautes imputables au personnel soignant.

La responsabilité de l’établissement de santé doit être également recherchée

Les médecins forment un pourvoi en cassation.

La Haute juridiction estime que la cour d’appel aurait dû vérifier si, bien que des tâches soient dévolues aux médecins en matière de réalimentations, le personnel de la clinique n’aurait pas commis une faute en lien de causalité avec la fausse route du patient en le laissant manger sans surveillance le plateau repas qui lui avait été apporté, alors qu’il était réalimenté après une extubation. L’arrêt est annulé sur ce point.

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 30 novembre 2016, 15-27.424